Mairie Roinville

D'illustres comédiens à Roinville

Une famille de comédiens s’est distinguée sur trois générations, du XVIIe au XVIIIe siècle. Plusieurs firent partie de la troupe de Molière, comme Marie Claveau, Philbert du Croisy ou Raymond Poisson. Paul Poisson et son fils François Arnould étaient de très bons acteurs à la Comédie Française. Jean François Regnard avait pour interprète favori, son ami Paul Poisson qui demeurait au château de Roinville depuis 1703. François Arnould, le fils de Paul, dit Poisson de Roinville, amusa à son époque le tout-Paris. Une curiosité chez les Poisson, ils sont spécialisés dans le rôle de Crispin, créé par Raymond et repris par le fils et le petit-fils.

Marie Claveau et Philbert Gassot du Croisy

Marie Claveau est née à Sainte-Hermine, près de la Rochelle, en juillet 1619. Elle est la fille de Loÿs Claveau et de Marie Boursault. La famille Claveau est liée à Monsieur de Landaz, lieutenant général de la Rochelle. Marie épousa, vers 1650 un beauceron, Philbert Gassot du Croisy. Tous les deux sont comédiens et jouent dans une troupe de Normandie. A cette époque, Molière et ses comédiens sont en pleine ascension. Lors d’une représentation à Rouen en 1658, il s’intéresse à une troupe locale où joue Philbert du Croisy et Marie Claveau. Du Croisy, qui est un homme au registre d’interprétation étendu, se présente à Molière qui l’engage sur le champ, ainsi que sa femme Marie Claveau. Celle-ci a joué quelques pièces sous le nom de mademoiselle du Croisy, à la cour de Louis XIV. Citons la “Critique de l’Ecole des Femmes” et l’Impromptu de Versailles. Philbert du Croisy continue une brillante carrière. Depuis 1664, Molière essaye en vain de faire représenter sa pièce, le Tartuffe, car la censure religieuse veille. Il faut attendre 1669, le roi fait venir Molière et lui dit ” Je vous autorise à jouer le Tartuffe “. Aussitôt Molière commence les répétitions ;  le rôle de Tartuffe est confié à du Croisy, Molière prend le rôle d’Orgon et Armande Béjart, celui d’Elmire. La première de la pièce, que Molière a passablement édulcorée et qui s’appelle maintenant le Tartuffe ou l’Imposteur, a lieu le 5 février. C’est un triomphe, la recette atteint alors le chiffre jamais vu de 2860 livres.

Philbert du Croisy meurt en 1695 à Conflans-Sainte-Honorine, où il demeurait avec sa femme Marie Claveau. Celle-ci décide par la suite, de rejoindre sa fille Marie Angélique et son gendre Paul Poisson à Roinville. Marie Claveau s’éteint le 30 septembre de la même année, à l’âge de 84 ans. Un fait peu courant pour un comédien du XVIIIe siècle, elle a été inhumée religieusement. Le père François Duret, docteur en théologie et curé de Roinville, célébre l’office en présence de la famille dont les signatures figurent au bas de la page de l’acte de décès sur le registre paroissial. Son corps repose dans l’église Saint-Denis, devant l’autel de la Vierge, à gauche du chœur.

Marie Claveau a épousé en premières noces Nicolas de Lécole et a eu plusieurs enfants dont Marie Angélique qui se mariera avec Paul Poisson.

 

Marie Claveau
Philbert Gassot du Croisy

Raymond Poisson

Raymond Poisson, dit Belleroche, est né en 1633. Il s’engage assez tôt dans une troupe de province, vers 1654. Il prend en 1659, grâce à la protection de Colbert, la tête d’une troupe théâtrale qui accompagne Louis XIV dans ses déplacements et y gagne de larges gratifications Il entre ensuite à l’Hôtel de Bourgogne, en même temps que sa femme Victoire Guérin, également comédienne, en avril 1660. On peut encore le voir dans le rôle de Crispin qu’il a créé, son buste en marbre est exposé au musée de la Scala de Milan. Ce valet matois, bredouilleur, toujours prêt à favoriser les amours de son maître contre honnête rétribution et qu’on retrouve dans maintes comédies de Regnard et de Lesage. Il est vêtu d’un costume traditionnel, emprunté à  l’Espagne : chapeau rond, fraise blanche, manteau noir, ceinture de cuir jaune à grande boucle de cuivre, petite épée et bottes à cuissardes. La verve et l’entrain de Raymond Poisson mettent le type nouveau de Crispin à la mode et tous les auteurs en vogue vont faire du ” Crispin “. Et comme tous les Poisson parlent ” bref “, tous les Crispin bredouillent ! Il est lui-même acteur et auteur, le “Baron de la Crasse” a connu un véritable succès, 262 représentations, ainsi que “l’Après Souper des Auberges” et”le Fou raisonnable”.

Raymond fait à l’Hôtel de Bourgogne une très belle carrière, poursuivie à la Comédie Française. Il arrondit ses fins de mois en sollicitant sans cesse ses protecteurs, les hauts personnages auxquels il dédie ses comédies, y compris le roi, qu’il ” assassine ” de vers et de madrigaux, précisant impudemment que ses louanges sont intéressées. Mais il est généralement bien accueilli, c’est déjà le rôle de Crispin qui est en lui et quand Louis XIV délie les cordons de sa bourse, les ducs et les ministres n’ont plus qu’à en faire autant !

Victoire Guérin a aussi débuté dans une troupe de campagne, celle de du Croisy. Elle joue à l’Hôtel de Bourgogne les confidentes tragiques et les secondes amoureuses comiques. Elle meurt en septembre 1678. Raymond Poisson se remarie avec Catherine Leroy, aussi comédienne. Il se retire du théâtre en avril 1685 et meurt le 10 mai 1690. Il a eu plusieurs enfants dont Charles, Pierre, Victor, Françoise et Paul qui a vécu à Roinville.

Paul Poisson

Paul Jean Jules Poisson, fils de Raymond Poisson est né en 1658 à Paris. Il paraît tout d’abord s’éloigner de la carrière théâtrale et on le voit quelque temps “portemanteau”  de Mgr Philippe d’Orléans, frère de Louis XIV, seigneur de Dourdan. L’instinct comique, inné dans la famille, détermine Paul à reprendre, aux applaudissements de tous, la survivance et les rôles de son père, mais sans jamais se faire auteur. Entré en mars 1686 au Théâtre français, ses débuts ne paraissent guère prometteurs, puisqu’on relève dans le journal de Dangeau ce commentaire ” on l’a trouvé médiocre “. Il ne quitte cependant ce théâtre, pour la première fois, qu’en 1711. Il est l’ami et l’interprète du poète Jean François Regnard qui demeure au château de Grillon à Dourdan.

Paul a épousé très jeune Marie Angélique de Lécole, fille de Marie Claveau et de Nicolas de Lécole (son premier mari, elle épousera en seconde noce Philbert  Gassot du Croisy). Marie Angélique a été admise, presque enfant en 1673, comme comédienne de la troupe de Molière. Elle a continué au théâtre de Guénégaud,  comme son mari, lors de la fusion des troupes. Elle s’est retirée en 1694, avec une pension de 1000 livres, à Saint-Germain-en-Laye.

Paul, de caractère assez coléreux,  a eu quelques démêlés avec ses collègues comédiens. En voici un exemple frappant. Il s’agit d’une querelle d’acteurs, comme il en existait beaucoup à cette époque et qui prenait rapidement des allures de duel. Cette savoureuse joute, digne des ” Trois Mousquetaires” a  pour protagonistes  Etienne Boyron, dit Baron et Paul Poisson.

 

Voici la plainte d’Etienne Baron du 4 juillet 1701 :

” Par devant nous Charles Bizoton, commissaire au Châtelet, est comparu Etienne Boyron, comédien de la troupe du roi, demeurant rue Condé, paroisse de Saint-Sulpice : lequel nous a fait plainte et dit que ce jourd’hui matin il s’est rendu à l’assemblée ordinaire de la troupe en l’hôtel de la Comédie ou étoit aussi le sieur Paul Poisson, lequel, dans la contestation d’un rôle, auroit dit quelques paroles désobligeantes à la demoiselle Beauval. Sur quoi le plaignant auroit pris la parole et dit qu’il étoit fort agréable de venir à l’âge de ladite demoiselle Beauval et d’avoir son mérite : le sieur Poisson auroit sur cela entrepris le plaignant sur sa capacité et après quelques paroles où entre autres ledit sieur Poisson lui auroit dit qu’il ne cessoit de dire des gueullées que quand il dormait, auxquelles parolles le plaignant lui auroit reparti que lui Poisson en disoit autant de fois qu’il ouvroit la bouche. Le discours a cessé et un instant après ledit Poisson a pris son jeton et est sorti. Le plaignant a pris le sien ensuite et, ayant pris congé de ceux qui composoient l’assemblée, il est sorti pour s’en retourner à sa maison susdite rue de Condé, et a été surpris qu’étant arrivé auprès du carrefour de la Porte Saint-Germain, il a senti qu’on le tiroit par la manche de son justaucorps, après quoi par son chapeau et, dans le moment a été frappé sur son chapeau qui étoit sur sa rête : il s’est tourné et a vu que c’étoit ledit Poisson qui avoit l’épée nue à la main dont il venoit de le frapper et l’auroit traité de bougre de jean-foutre. Ledit plaignant, le voyant en état de récidive, s’est mis en défense pour garantir sa vie après avoir pris un chacun à témoin. Plusieurs personnes, ayant vu l’action, en ont blâmé ledit Poisson qui a continué ses violences et fait beaucoup de menaces. Pour raison de quoi et attendu que c’est un assassinat prémédité, il est obligé de nous rendre ladite plainte.

Signé Bizoton et Boyron “

 

Voici maintenant la plainte de Paul Poisson, rendue 10 heures après celle de Baron :

” Par devant nous Charles Bizoton commissaire au Châtelet est comparu Paul Poisson, comédien du roi, demeurant rue du Four, lequel nous a dit que ce matin, étant à l’assemblée de la troupe, à l’hôtel de la Comédie, où l’on proposoit de donner quelques rôles, ayant dit son avis comme les autre, il fut entrepris par le sieur Baron, qui lui tint plusieurs discours insolens, disant que son fils étoit l’ excrément de la Comédie. A quoi ne lui ayant répondu autre chose, sinon qu’il valoit autant que lui, ledit Baron, se mettant dans des emportements effroyables, le menaça que s’il étoit hors de l’hôtel il ne lui tiendroit pas un pareil langage et ; dans l’instant le sieur Beauval et sa femme prirent le parti dudit Baron en lui disant qu’il étoit un insolent, ce qui marquoit un dessein prémédité de lui faire insulte. Il auroit prié ledit Beauval de faire taire sa femme, qui n’avoit cessé de l’insulter, et ledit Baron de lui faire plusieurs menaces en levant un canne qu’il tenoit à la main ; pour quoi il auroit été obligé, pour éviter le désordre, de se retirer, et en sortant, auroit été surpris de rencontrer dans la rue ledit Baron faisant la démonstration de lever sa canne sur lui, ce qui l’auroit obligé de se mettre en défense et tirer l’épée contre ledit Baron qui l’auroit pareillement tirée et poussé le plaignant de telle manière qu’il auroit manqué de le tuer, sans le secours du sieur Champmeslé et autres qui les auroient séparés, voyant le sieur de la Thorilière l’épée à la main à côté dudit Baron, son neveu, ce qui l’auroit obligé de leur dire qu’il n’étoit pas juste de se mettre deux contre lui. Pourquoi  il se trouve obligé de nous rendre la présente plainte.

Signé Bizoton et Poisson “

 

 Nous ne connaissons malheureusement pas l’épilogue de ces plaintes mais il est probable que le commissaire Bizoton ait renvoyé les deux protagonistes non sans les avoir au préalable copieusement sermonnés.

Les Poisson se distinguent de nouveau, quelques années plus tard, le 1er décembre 1705 une plainte est déposée par Françoise Victoire Poisson, sœur de Paul, contre un huissier qui lui a saisi indûment son mobilier. La scène est ” théâtrale “,  en présence de plusieurs acteurs témoins de l’affaire, le ton monte rapidement, et l’huissier  les traitent  de ” bougres de chiens de comédiens “.

Paul et Marie-Angélique s’installent avec Marie Claveau, en mars 1703, au château de Roinville, un joli manoir construit en 1613,  dont la devise inscrite sur le fronton est la suivante :

” Si cette maison ne te plaist,

Sans m’en désigner de nouvelle,

Laisse-la moy telle qu’elle est

Et fast la tienne plus belle

 

Pour se rapprocher sans doute de son ami Jean François Regnard (propriétaire du château de Grillon à Dourdan), Paul y fait installer un petit théâtre, aujourd’hui disparu, une grande salle, haute de plafond, qui occupe tout le grand comble du château. Cette salle, dont la charpente a été dissimulée par un plafond voûté, est aménagée pour servir de salle de spectacle. Un recoin sert de vestiaire aux comédiens. En ouvrant une porte, on pénètre dans un couloir qui longe la salle et qui fait œuvre de coulisses, pour déboucher sur la scène. C’est là que les Poisson apprennent leurs rôles et que Regnard, plus d’une fois sans doute, devant des amis, vient essayer lui-même ses pièces sur une scène qui est plus spacieuse et mieux adaptée pour le théâtre que le salon de Grillon.

Paul Poisson débute au Théâtre Français en 1686, un an après la retraite de son père, le populaire inventeur des Crispin. Il reprend tous ses rôles et maintient fidèlement l’aspect et les particularités des personnages de Crispin. Il crée les trois Crispin du “Légataire universel”, des “Folies amoureuses” et du “Roi de Cocagne” et se montre supérieur dans les rôles du marquis, “le Joueur”, “le Legs”, dans Turcaret et de Monsieur Jourdain du “Bourgeois Gentilhomme”.

Au printemps 1707, Regnard a une affaire assez grave sur les bras dont il va se tirer. Sa grande pièce : le ” Légataire universel ” est reçue et les rôles sont déjà distribués. Le rôle principal est donné à la Thorilière, or celui-ci tombe malade et ne peut jouer. La pièce attendue est compromise. Regnard la recompose de telle sorte que le rôle principal soit celui de Crispin, pour le donner à Paul Poisson. La pièce est scabreuse, on reproche à Crispin d’être un fripon et un homme sans mœurs. A cause de la censure, la fameuse première, si désirée et si réussie, n’aura lieu que le 9 janvier 1708. La pièce est un triomphe, on dénombre ce jour là 1100 spectateurs payants et la recette est de 2446 livres, ce qui est énorme pour l’époque ! On retrouve une certaine similitude avec Molière par les difficultés qu’il a eu pour monter son célèbre Tartuffe, créé par Gassot du Croisy.

Paul Poisson et Marie Angélique meurent tous deux à Saint-Germain-en-Laye, lui à 77 ans, le 29 décembre 1735 et elle à 99 ans le 12 décembre 1756.

Les enfants de Paul Poisson

Paul Poisson et Marie Angélique de Lécole ont eu trois enfants. Joseph Guyot raconte : “quand le poète Regnard venait à Roinville voir la famille Poisson, il trouvait près du père et de la mère, trois charmants enfants”

Magdeleine, dite Madame de Gomez, née en 1684, elle écrit des romans et des tragédies pour le Théâtre français dont “Ilabis” en 1714 et “Cléarque” en 1717.

Philippe Poisson, l’aîné, né en 1683, débute à la Comédie française en 1700. Il était certainement peu doué pour le théâtre, car s’il est dit élégamment qu’il était plutôt fait pour le travail dans un cabinet que sur les planche, le sieur Etienne Baron (voir ses démêlés avec Paul Poisson), le traite proprement “d’excrément de la comédie” ! Il se retire comme son père en 1711 et meurt à Saint-Germain-en-Laye le 4 août 1743.

François Arnould Poisson, le cadet, dit Poisson de Roinville, né en 1694, débute au Théâtre Français le 21 mai 1722 avec le rôle de Sosie dans “Amphytrion”. Encore enfant, il amusait le poète Regnard, au château de Roinville, par une verve comique qui fera de lui le digne émule de son père et de son aïeul, principalement dans le rôle de Crispin dont il hérite de tous les secrets. Il devient comédien malgré son père car il était destiné à une carrière militaire. Il obtient en secret un “ordre de début” à la Comédie Française et réussit à convaincre son père de sa vocation et de son talent. Un jour, il lui demande “grâce” de jouer devant lui le rôle qu’il avait choisi dans le genre qu’il avait étudié. Et son père est alors si content de la façon dont il  rend le texte, qu’il se jette à son cou, l’embrasse avec des larmes de joie, reconnaît son sang et sollicite lui-même le début et la réception d’un fils si digne de son père et de son aïeul. Il prendra rapidement le surnom de Poisson de Roinville. Il excelle dans “Monsieur de Pouceaugnac”, dans le marquis ridicule de la “Mère Coquette”, dans “Bernadille” et dans “Turcaret”de Lesage. Les spectateurs rient dès qu’il apparaît en scène, ils apprécient son naturel. Il est petit et laid, il péche par ses trous de mémoire et a le tort de boire un peu trop ! Un jour qu’il joue dans la “Colonie de Sainte-Foix”, il bredouille tellement que l’auteur, irrité, lui retire son rôle. Il épouse une tragédienne, Marie Catillon qui débute en 1730 dans le rôle d’Hermione dans “Andromaque”, puis joue Chimène du “Cid” et Hortense du “Florentin” et se retire du théâtre en 1741, avec une pension de 1000 livres.

Poisson de Roinville meurt à Paris le 15 octobre 1753 à l’âge de 59 ans. Grimm, le célèbre critique, lui consacre un article des plus élogieux. Dorat avait dit ” Poisson qui si longtemps amusa tout Paris “. Grimm dans sa correspondance littéraire, commente le vers de Dorat sur Crispin III :

” La Comédie française a fait, il n’y a pas longtemps, une perte considérable dans la personne de l’illustre Poisson. Cet acteur, le dernier de sa race, était extrêmement agréable au public. Il serait peut-être impossible de donner une idée juste du jeu et du talent de cet acteur. On pourrait l’appeler un recueil général de toutes les exceptions contre toutes les règles. C’est en Turcaret, c’est en Pourceaugnac, c’est quand il avait bien adapté son habit de caractère de son rôle, ce qu’il faisait toujours à outrance, c’est alors qu’il faisait les délices du public, c’est alors que le parterre lui prodiguait les hommages qu’il est habitué de rendre aux grands hommes et aux talents supérieurs “

Compardon Emile. -Les comédiens du roi de la troupe française pendant les deux derniers siècle. -Paris, 1879

Mongrédien Georges. -La vie quotidienne des comédiens au temps de Molière. – Paris, ?

Maugrédien Georges. -Dictionnaire biographique de comédiens français au XVIIe siècle, suivi d’un inventaire des troupes 1590-1710. -Paris, 1972

Une famille de comédiens s’est distinguée sur trois générations, du XVIIe au XVIIIe siècle. Plusieurs firent partie de la troupe de Molière, comme Marie Claveau, Philbert du Croisy ou Raymond Poisson. Paul Poisson et son fils François Arnould étaient de très bons acteurs à la Comédie Française. Jean François Regnard avait pour interprète favori, son ami Paul Poisson qui demeurait au château de Roinville depuis 1703. François Arnould, le fils de Paul, dit Poisson de Roinville, amusa à son époque le tout-Paris. Une curiosité chez les Poisson, ils sont spécialisés dans le rôle de Crispin, créé par Raymond et repris par le fils et le petit-fils.

Marie Claveau et Philbert Gassot du Croisy

Marie Claveau est née à Sainte-Hermine, près de la Rochelle, en juillet 1619. Elle est la fille de Loÿs Claveau et de Marie Boursault. La famille Claveau est liée à Monsieur de Landaz, lieutenant général de la Rochelle. Marie épousa, vers 1650 un beauceron, Philbert Gassot du Croisy. Tous les deux sont comédiens et jouent dans une troupe de Normandie. A cette époque, Molière et ses comédiens sont en pleine ascension. Lors d’une représentation à Rouen en 1658, il s’intéresse à une troupe locale où joue Philbert du Croisy et Marie Claveau. Du Croisy, qui est un homme au registre d’interprétation étendu, se présente à Molière qui l’engage sur le champ, ainsi que sa femme Marie Claveau.

Marie Claveau
Philbert Gassot du Croisy

Celle-ci a joué quelques pièces sous le nom de mademoiselle du Croisy, à la cour de Louis XIV. Citons la “Critique de l’Ecole des Femmes” et l’Impromptu de Versailles. Philbert du Croisy continue une brillante carrière. Depuis 1664, Molière essaye en vain de faire représenter sa pièce, le Tartuffe, car la censure religieuse veille. Il faut attendre 1669, le roi fait venir Molière et lui dit ” Je vous autorise à jouer le Tartuffe “. Aussitôt Molière commence les répétitions ;  le rôle de Tartuffe est confié à du Croisy, Molière prend le rôle d’Orgon et Armande Béjart, celui d’Elmire. La première de la pièce, que Molière a passablement édulcorée et qui s’appelle maintenant le Tartuffe ou l’Imposteur, a lieu le 5 février. C’est un triomphe, la recette atteint alors le chiffre jamais vu de 2860 livres.

Philbert du Croisy meurt en 1695 à Conflans-Sainte-Honorine, où il demeurait avec sa femme Marie Claveau. Celle-ci décide par la suite, de rejoindre sa fille Marie Angélique et son gendre Paul Poisson à Roinville. Marie Claveau s’éteint le 30 septembre de la même année, à l’âge de 84 ans. Un fait peu courant pour un comédien du XVIIIe siècle, elle a été inhumée religieusement. Le père François Duret, docteur en théologie et curé de Roinville, célébre l’office en présence de la famille dont les signatures figurent au bas de la page de l’acte de décès sur le registre paroissial. Son corps repose dans l’église Saint-Denis, devant l’autel de la Vierge, à gauche du chœur.

Marie Claveau a épousé en premières noces Nicolas de Lécole et a eu plusieurs enfants dont Marie Angélique qui se mariera avec Paul Poisson.

Raymond Poisson

Raymond Poisson, dit Belleroche, est né en 1633. Il s’engage assez tôt dans une troupe de province, vers 1654. Il prend en 1659, grâce à la protection de Colbert, la tête d’une troupe théâtrale qui accompagne Louis XIV dans ses déplacements et y gagne de larges gratifications Il entre ensuite à l’Hôtel de Bourgogne, en même temps que sa femme Victoire Guérin, également comédienne, en avril 1660. 

On peut encore le voir dans le rôle de Crispin qu’il a créé, son buste en marbre est exposé au musée de la Scala de Milan. Ce valet matois, bredouilleur, toujours prêt à favoriser les amours de son maître contre honnête rétribution et qu’on retrouve dans maintes comédies de Regnard et de Lesage. Il est vêtu d’un costume traditionnel, emprunté à  l’Espagne : chapeau rond, fraise blanche, manteau noir, ceinture de cuir jaune à grande boucle de cuivre, petite épée et bottes à cuissardes. La verve et l’entrain de Raymond Poisson mettent le type nouveau de Crispin à la mode et tous les auteurs en vogue vont faire du ” Crispin “. Et comme tous les Poisson parlent ” bref “, tous les Crispin bredouillent ! Il est lui-même acteur et auteur, le “Baron de la Crasse” a connu un véritable succès, 262 représentations, ainsi que “l’Après Souper des Auberges” et “le Fou raisonnable”.

Raymond fait à l’Hôtel de Bourgogne une très belle carrière, poursuivie à la Comédie Française. Il arrondit ses fins de mois en sollicitant sans cesse ses protecteurs, les hauts personnages auxquels il dédie ses comédies, y compris le roi, qu’il ” assassine ” de vers et de madrigaux, précisant impudemment que ses louanges sont intéressées. Mais il est généralement bien accueilli, c’est déjà le rôle de Crispin qui est en lui et quand Louis XIV délie les cordons de sa bourse, les ducs et les ministres n’ont plus qu’à en faire autant !

Victoire Guérin a aussi débuté dans une troupe de campagne, celle de du Croisy. Elle joue à l’Hôtel de Bourgogne les confidentes tragiques et les secondes amoureuses comiques. Elle meurt en septembre 1678. Raymond Poisson se remarie avec Catherine Leroy, aussi comédienne. Il se retire du théâtre en avril 1685 et meurt le 10 mai 1690. Il a eu plusieurs enfants dont Charles, Pierre, Victor, Françoise et Paul qui a vécu à Roinville.

Paul Poisson

Paul Jean Jules Poisson, fils de Raymond Poisson est né en 1658 à Paris. Il paraît tout d’abord s’éloigner de la carrière théâtrale et on le voit quelque temps “portemanteau”  de Mgr Philippe d’Orléans, frère de Louis XIV, seigneur de Dourdan. L’instinct comique, inné dans la famille, détermine Paul à reprendre, aux applaudissements de tous, la survivance et les rôles de son père, mais sans jamais se faire auteur. Entré en mars 1686 au Théâtre français, ses débuts ne paraissent guère prometteurs, puisqu’on relève dans le journal de Dangeau ce commentaire ” on l’a trouvé médiocre “. Il ne quitte cependant ce théâtre, pour la première fois, qu’en 1711. Il est l’ami et l’interprète du poète Jean François Regnard qui demeure au château de Grillon à Dourdan.

Paul a épousé très jeune Marie Angélique de Lécole, fille de Marie Claveau et de Nicolas de Lécole (son premier mari, elle épousera en seconde noce Philbert  Gassot du Croisy). Marie Angélique a été admise, presque enfant en 1673, comme comédienne de la troupe de Molière. Elle a continué au théâtre de Guénégaud,  comme son mari, lors de la fusion des troupes. Elle s’est retirée en 1694, avec une pension de 1000 livres, à Saint-Germain-en-Laye.

Paul, de caractère assez coléreux,  a eu quelques démêlés avec ses collègues comédiens. En voici un exemple frappant. Il s’agit d’une querelle d’acteurs, comme il en existait beaucoup à cette époque et qui prenait rapidement des allures de duel. Cette savoureuse joute, digne des ” Trois Mousquetaires” a  pour protagonistes  Etienne Boyron, dit Baron et Paul Poisson.

Voici la plainte d’Etienne Baron du 4 juillet 1701 :

” Par devant nous Charles Bizoton, commissaire au Châtelet, est comparu Etienne Boyron, comédien de la troupe du roi, demeurant rue Condé, paroisse de Saint-Sulpice : lequel nous a fait plainte et dit que ce jourd’hui matin il s’est rendu à l’assemblée ordinaire de la troupe en l’hôtel de la Comédie ou étoit aussi le sieur Paul Poisson, lequel, dans la contestation d’un rôle, auroit dit quelques paroles désobligeantes à la demoiselle Beauval. Sur quoi le plaignant auroit pris la parole et dit qu’il étoit fort agréable de venir à l’âge de ladite demoiselle Beauval et d’avoir son mérite : le sieur Poisson auroit sur cela entrepris le plaignant sur sa capacité et après quelques paroles où entre autres ledit sieur Poisson lui auroit dit qu’il ne cessoit de dire des gueullées que quand il dormait, auxquelles parolles le plaignant lui auroit reparti que lui Poisson en disoit autant de fois qu’il ouvroit la bouche. Le discours a cessé et un instant après ledit Poisson a pris son jeton et est sorti. Le plaignant a pris le sien ensuite et, ayant pris congé de ceux qui composoient l’assemblée, il est sorti pour s’en retourner à sa maison susdite rue de Condé, et a été surpris qu’étant arrivé auprès du carrefour de la Porte Saint-Germain, il a senti qu’on le tiroit par la manche de son justaucorps, après quoi par son chapeau et, dans le moment a été frappé sur son chapeau qui étoit sur sa rête : il s’est tourné et a vu que c’étoit ledit Poisson qui avoit l’épée nue à la main dont il venoit de le frapper et l’auroit traité de bougre de jean-foutre. Ledit plaignant, le voyant en état de récidive, s’est mis en défense pour garantir sa vie après avoir pris un chacun à témoin. Plusieurs personnes, ayant vu l’action, en ont blâmé ledit Poisson qui a continué ses violences et fait beaucoup de menaces. Pour raison de quoi et attendu que c’est un assassinat prémédité, il est obligé de nous rendre ladite plainte.

Signé Bizoton et Boyron “

 

Voici maintenant la plainte de Paul Poisson, rendue 10 heures après celle de Baron :

” Par devant nous Charles Bizoton commissaire au Châtelet est comparu Paul Poisson, comédien du roi, demeurant rue du Four, lequel nous a dit que ce matin, étant à l’assemblée de la troupe, à l’hôtel de la Comédie, où l’on proposoit de donner quelques rôles, ayant dit son avis comme les autre, il fut entrepris par le sieur Baron, qui lui tint plusieurs discours insolens, disant que son fils étoit l’ excrément de la Comédie. A quoi ne lui ayant répondu autre chose, sinon qu’il valoit autant que lui, ledit Baron, se mettant dans des emportements effroyables, le menaça que s’il étoit hors de l’hôtel il ne lui tiendroit pas un pareil langage et ; dans l’instant le sieur Beauval et sa femme prirent le parti dudit Baron en lui disant qu’il étoit un insolent, ce qui marquoit un dessein prémédité de lui faire insulte. Il auroit prié ledit Beauval de faire taire sa femme, qui n’avoit cessé de l’insulter, et ledit Baron de lui faire plusieurs menaces en levant un canne qu’il tenoit à la main ; pour quoi il auroit été obligé, pour éviter le désordre, de se retirer, et en sortant, auroit été surpris de rencontrer dans la rue ledit Baron faisant la démonstration de lever sa canne sur lui, ce qui l’auroit obligé de se mettre en défense et tirer l’épée contre ledit Baron qui l’auroit pareillement tirée et poussé le plaignant de telle manière qu’il auroit manqué de le tuer, sans le secours du sieur Champmeslé et autres qui les auroient séparés, voyant le sieur de la Thorilière l’épée à la main à côté dudit Baron, son neveu, ce qui l’auroit obligé de leur dire qu’il n’étoit pas juste de se mettre deux contre lui. Pourquoi  il se trouve obligé de nous rendre la présente plainte.

Signé Bizoton et Poisson “

 

 Nous ne connaissons malheureusement pas l’épilogue de ces plaintes mais il est probable que le commissaire Bizoton ait renvoyé les deux protagonistes non sans les avoir au préalable copieusement sermonnés.

Les Poisson se distinguent de nouveau, quelques années plus tard, le 1er décembre 1705 une plainte est déposée par Françoise Victoire Poisson, sœur de Paul, contre un huissier qui lui a saisi indûment son mobilier. La scène est ” théâtrale “,  en présence de plusieurs acteurs témoins de l’affaire, le ton monte rapidement, et l’huissier  les traitent  de ” bougres de chiens de comédiens “.

Paul et Marie-Angélique s’installent avec Marie Claveau, en mars 1703, au château de Roinville, un joli manoir construit en 1613,  dont la devise inscrite sur le fronton est la suivante :

” Si cette maison ne te plaist,

Sans m’en désigner de nouvelle,

Laisse-la moy telle qu’elle est

Et fast la tienne plus belle

 

Pour se rapprocher sans doute de son ami Jean François Regnard (propriétaire du château de Grillon à Dourdan), Paul y fait installer un petit théâtre, aujourd’hui disparu, une grande salle, haute de plafond, qui occupe tout le grand comble du château. Cette salle, dont la charpente a été dissimulée par un plafond voûté, est aménagée pour servir de salle de spectacle. Un recoin sert de vestiaire aux comédiens. En ouvrant une porte, on pénètre dans un couloir qui longe la salle et qui fait œuvre de coulisses, pour déboucher sur la scène. C’est là que les Poisson apprennent leurs rôles et que Regnard, plus d’une fois sans doute, devant des amis, vient essayer lui-même ses pièces sur une scène qui est plus spacieuse et mieux adaptée pour le théâtre que le salon de Grillon.

Paul Poisson débute au Théâtre Français en 1686, un an après la retraite de son père, le populaire inventeur des Crispin. Il reprend tous ses rôles et maintient fidèlement l’aspect et les particularités des personnages de Crispin. Il crée les trois Crispin du “Légataire universel”, des “Folies amoureuses” et du “Roi de Cocagne” et se montre supérieur dans les rôles du marquis, “le Joueur”, “le Legs”, dans Turcaret et de Monsieur Jourdain du “Bourgeois Gentilhomme”.

Au printemps 1707, Regnard a une affaire assez grave sur les bras dont il va se tirer. Sa grande pièce : le ” Légataire universel ” est reçue et les rôles sont déjà distribués. Le rôle principal est donné à la Thorilière, or celui-ci tombe malade et ne peut jouer. La pièce attendue est compromise. Regnard la recompose de telle sorte que le rôle principal soit celui de Crispin, pour le donner à Paul Poisson. La pièce est scabreuse, on reproche à Crispin d’être un fripon et un homme sans mœurs. A cause de la censure, la fameuse première, si désirée et si réussie, n’aura lieu que le 9 janvier 1708. La pièce est un triomphe, on dénombre ce jour là 1100 spectateurs payants et la recette est de 2446 livres, ce qui est énorme pour l’époque ! On retrouve une certaine similitude avec Molière par les difficultés qu’il a eu pour monter son célèbre Tartuffe, créé par Gassot du Croisy.

Paul Poisson et Marie Angélique meurent tous deux à Saint-Germain-en-Laye, lui à 77 ans, le 29 décembre 1735 et elle à 99 ans le 12 décembre 1756.

Les enfants de Paul Poisson

Paul Poisson et Marie Angélique de Lécole ont eu trois enfants. Joseph Guyot raconte : “quand le poète Regnard venait à Roinville voir la famille Poisson, il trouvait près du père et de la mère, trois charmants enfants”

Magdeleine, dite Madame de Gomez, née en 1684, elle écrit des romans et des tragédies pour le Théâtre français dont “Ilabis” en 1714 et “Cléarque” en 1717.

Philippe Poisson, l’aîné, né en 1683, débute à la Comédie française en 1700. Il était certainement peu doué pour le théâtre, car s’il est dit élégamment qu’il était plutôt fait pour le travail dans un cabinet que sur les planche, le sieur Etienne Baron (voir ses démêlés avec Paul Poisson), le traite proprement “d’excrément de la comédie” ! Il se retire comme son père en 1711 et meurt à Saint-Germain-en-Laye le 4 août 1743.

François Arnould Poisson, le cadet, dit Poisson de Roinville, né en 1694, débute au Théâtre Français le 21 mai 1722 avec le rôle de Sosie dans “Amphytrion”. Encore enfant, il amusait le poète Regnard, au château de Roinville, par une verve comique qui fera de lui le digne émule de son père et de son aïeul, principalement dans le rôle de Crispin dont il hérite de tous les secrets. Il devient comédien malgré son père car il était destiné à une carrière militaire. 

Il obtient en secret un “ordre de début” à la Comédie Française et réussit à convaincre son père de sa vocation et de son talent. Un jour, il lui demande “grâce” de jouer devant lui le rôle qu’il avait choisi dans le genre qu’il avait étudié. Et son père est alors si content de la façon dont il  rend le texte, qu’il se jette à son cou, l’embrasse avec des larmes de joie, reconnaît son sang et sollicite lui-même le début et la réception d’un fils si digne de son père et de son aïeul. Il prendra rapidement le surnom de Poisson de Roinville. Il excelle dans “Monsieur de Pouceaugnac”, dans le marquis ridicule de la “Mère Coquette”, dans “Bernadille” et dans “Turcaret”de Lesage. Les spectateurs rient dès qu’il apparaît en scène, ils apprécient son naturel. Il est petit et laid, il péche par ses trous de mémoire et a le tort de boire un peu trop ! Un jour qu’il joue dans la “Colonie de Sainte-Foix”, il bredouille tellement que l’auteur, irrité, lui retire son rôle. Il épouse une tragédienne, Marie Catillon qui débute en 1730 dans le rôle d’Hermione dans “Andromaque”, puis joue Chimène du “Cid” et Hortense du “Florentin” et se retire du théâtre en 1741, avec une pension de 1000 livres.

Poisson de Roinville meurt à Paris le 15 octobre 1753 à l’âge de 59 ans. Grimm, le célèbre critique, lui consacre un article des plus élogieux. Dorat avait dit ” Poisson qui si longtemps amusa tout Paris “. Grimm dans sa correspondance littéraire, commente le vers de Dorat sur Crispin III :

” La Comédie française a fait, il n’y a pas longtemps, une perte considérable dans la personne de l’illustre Poisson. Cet acteur, le dernier de sa race, était extrêmement agréable au public. Il serait peut-être impossible de donner une idée juste du jeu et du talent de cet acteur. On pourrait l’appeler un recueil général de toutes les exceptions contre toutes les règles. C’est en Turcaret, c’est en Pourceaugnac, c’est quand il avait bien adapté son habit de caractère de son rôle, ce qu’il faisait toujours à outrance, c’est alors qu’il faisait les délices du public, c’est alors que le parterre lui prodiguait les hommages qu’il est habitué de rendre aux grands hommes et aux talents supérieurs “

Compardon Emile. -Les comédiens du roi de la troupe française pendant les deux derniers siècle. -Paris, 1879

Mongrédien Georges. -La vie quotidienne des comédiens au temps de Molière. – Paris, ?

Maugrédien Georges. -Dictionnaire biographique de comédiens français au XVIIe siècle, suivi d’un inventaire des troupes 1590-1710. -Paris, 1972

Une famille de comédiens s’est distinguée sur trois générations, du XVIIe au XVIIIe siècle. Plusieurs firent partie de la troupe de Molière, comme Marie Claveau, Philbert du Croisy ou Raymond Poisson. Paul Poisson et son fils François Arnould étaient de très bons acteurs à la Comédie Française. Jean François Regnard avait pour interprète favori, son ami Paul Poisson qui demeurait au château de Roinville depuis 1703. François Arnould, le fils de Paul, dit Poisson de Roinville, amusa à son époque le tout-Paris. Une curiosité chez les Poisson, ils sont spécialisés dans le rôle de Crispin, créé par Raymond et repris par le fils et le petit-fils.

Marie Claveau et Philbert Gassot du Croisy

Marie Claveau est née à Sainte-Hermine, près de la Rochelle, en juillet 1619. Elle est la fille de Loÿs Claveau et de Marie Boursault. La famille Claveau est liée à Monsieur de Landaz, lieutenant général de la Rochelle. Marie épousa, vers 1650 un beauceron, Philbert Gassot du Croisy. Tous les deux sont comédiens et jouent dans une troupe de Normandie. A cette époque, Molière et ses comédiens sont en pleine ascension. Lors d’une représentation à Rouen en 1658, il s’intéresse à une troupe locale où joue Philbert du Croisy et Marie Claveau. Du Croisy, qui est un homme au registre d’interprétation étendu, se présente à Molière qui l’engage sur le champ, ainsi que sa femme Marie Claveau.

Celle-ci a joué quelques pièces sous le nom de mademoiselle du Croisy, à la cour de Louis XIV. Citons la “Critique de l’Ecole des Femmes” et l’Impromptu de Versailles. Philbert du Croisy continue une brillante carrière. Depuis 1664, Molière essaye en vain de faire représenter sa pièce, le Tartuffe, car la censure religieuse veille. Il faut attendre 1669, le roi fait venir Molière et lui dit ” Je vous autorise à jouer le Tartuffe “. Aussitôt Molière commence les répétitions ;  le rôle de Tartuffe est confié à du Croisy, Molière prend le rôle d’Orgon et Armande Béjart, celui d’Elmire. La première de la pièce, que Molière a passablement édulcorée et qui s’appelle maintenant le Tartuffe ou l’Imposteur, a lieu le 5 février. C’est un triomphe, la recette atteint alors le chiffre jamais vu de 2860 livres.

Philbert du Croisy meurt en 1695 à Conflans-Sainte-Honorine, où il demeurait avec sa femme Marie Claveau. Celle-ci décide par la suite, de rejoindre sa fille Marie Angélique et son gendre Paul Poisson à Roinville. Marie Claveau s’éteint le 30 septembre de la même année, à l’âge de 84 ans. Un fait peu courant pour un comédien du XVIIIe siècle, elle a été inhumée religieusement. Le père François Duret, docteur en théologie et curé de Roinville, célébre l’office en présence de la famille dont les signatures figurent au bas de la page de l’acte de décès sur le registre paroissial. Son corps repose dans l’église Saint-Denis, devant l’autel de la Vierge, à gauche du chœur.

Marie Claveau a épousé en premières noces Nicolas de Lécole et a eu plusieurs enfants dont Marie Angélique qui se mariera avec Paul Poisson.

 

Marie Claveau
Philbert Gassot du Croisy

Raymond Poisson

Raymond Poisson, dit Belleroche, est né en 1633. Il s’engage assez tôt dans une troupe de province, vers 1654. Il prend en 1659, grâce à la protection de Colbert, la tête d’une troupe théâtrale qui accompagne Louis XIV dans ses déplacements et y gagne de larges gratifications Il entre ensuite à l’Hôtel de Bourgogne, en même temps que sa femme Victoire Guérin, également comédienne, en avril 1660.

On peut encore le voir dans le rôle de Crispin qu’il a créé, son buste en marbre est exposé au musée de la Scala de Milan. Ce valet matois, bredouilleur, toujours prêt à favoriser les amours de son maître contre honnête rétribution et qu’on retrouve dans maintes comédies de Regnard et de Lesage. Il est vêtu d’un costume traditionnel, emprunté à  l’Espagne : chapeau rond, fraise blanche, manteau noir, ceinture de cuir jaune à grande boucle de cuivre, petite épée et bottes à cuissardes. La verve et l’entrain de Raymond Poisson mettent le type nouveau de Crispin à la mode et tous les auteurs en vogue vont faire du ” Crispin “. Et comme tous les Poisson parlent ” bref “, tous les Crispin bredouillent ! Il est lui-même acteur et auteur, le “Baron de la Crasse” a connu un véritable succès, 262 représentations, ainsi que “l’Après Souper des Auberges” et “le Fou raisonnable”.

Raymond fait à l’Hôtel de Bourgogne une très belle carrière, poursuivie à la Comédie Française. Il arrondit ses fins de mois en sollicitant sans cesse ses protecteurs, les hauts personnages auxquels il dédie ses comédies, y compris le roi, qu’il ” assassine ” de vers et de madrigaux, précisant impudemment que ses louanges sont intéressées. Mais il est généralement bien accueilli, c’est déjà le rôle de Crispin qui est en lui et quand Louis XIV délie les cordons de sa bourse, les ducs et les ministres n’ont plus qu’à en faire autant !

Victoire Guérin a aussi débuté dans une troupe de campagne, celle de du Croisy. Elle joue à l’Hôtel de Bourgogne les confidentes tragiques et les secondes amoureuses comiques. Elle meurt en septembre 1678. Raymond Poisson se remarie avec Catherine Leroy, aussi comédienne. Il se retire du théâtre en avril 1685 et meurt le 10 mai 1690. Il a eu plusieurs enfants dont Charles, Pierre, Victor, Françoise et Paul qui a vécu à Roinville.

Paul Poisson

Paul Jean Jules Poisson, fils de Raymond Poisson est né en 1658 à Paris. Il paraît tout d’abord s’éloigner de la carrière théâtrale et on le voit quelque temps “portemanteau”  de Mgr Philippe d’Orléans, frère de Louis XIV, seigneur de Dourdan. L’instinct comique, inné dans la famille, détermine Paul à reprendre, aux applaudissements de tous, la survivance et les rôles de son père, mais sans jamais se faire auteur. Entré en mars 1686 au Théâtre français, ses débuts ne paraissent guère prometteurs, puisqu’on relève dans le journal de Dangeau ce commentaire ” on l’a trouvé médiocre “. Il ne quitte cependant ce théâtre, pour la première fois, qu’en 1711. Il est l’ami et l’interprète du poète Jean François Regnard qui demeure au château de Grillon à Dourdan.

Paul a épousé très jeune Marie Angélique de Lécole, fille de Marie Claveau et de Nicolas de Lécole (son premier mari, elle épousera en seconde noce Philbert  Gassot du Croisy). Marie Angélique a été admise, presque enfant en 1673, comme comédienne de la troupe de Molière. Elle a continué au théâtre de Guénégaud,  comme son mari, lors de la fusion des troupes. Elle s’est retirée en 1694, avec une pension de 1000 livres, à Saint-Germain-en-Laye.

Paul, de caractère assez coléreux,  a eu quelques démêlés avec ses collègues comédiens. En voici un exemple frappant. Il s’agit d’une querelle d’acteurs, comme il en existait beaucoup à cette époque et qui prenait rapidement des allures de duel. Cette savoureuse joute, digne des ” Trois Mousquetaires” a  pour protagonistes  Etienne Boyron, dit Baron et Paul Poisson.

Voici la plainte d’Etienne Baron du 4 juillet 1701 :

” Par devant nous Charles Bizoton, commissaire au Châtelet, est comparu Etienne Boyron, comédien de la troupe du roi, demeurant rue Condé, paroisse de Saint-Sulpice : lequel nous a fait plainte et dit que ce jourd’hui matin il s’est rendu à l’assemblée ordinaire de la troupe en l’hôtel de la Comédie ou étoit aussi le sieur Paul Poisson, lequel, dans la contestation d’un rôle, auroit dit quelques paroles désobligeantes à la demoiselle Beauval. Sur quoi le plaignant auroit pris la parole et dit qu’il étoit fort agréable de venir à l’âge de ladite demoiselle Beauval et d’avoir son mérite : le sieur Poisson auroit sur cela entrepris le plaignant sur sa capacité et après quelques paroles où entre autres ledit sieur Poisson lui auroit dit qu’il ne cessoit de dire des gueullées que quand il dormait, auxquelles parolles le plaignant lui auroit reparti que lui Poisson en disoit autant de fois qu’il ouvroit la bouche. Le discours a cessé et un instant après ledit Poisson a pris son jeton et est sorti. Le plaignant a pris le sien ensuite et, ayant pris congé de ceux qui composoient l’assemblée, il est sorti pour s’en retourner à sa maison susdite rue de Condé, et a été surpris qu’étant arrivé auprès du carrefour de la Porte Saint-Germain, il a senti qu’on le tiroit par la manche de son justaucorps, après quoi par son chapeau et, dans le moment a été frappé sur son chapeau qui étoit sur sa rête : il s’est tourné et a vu que c’étoit ledit Poisson qui avoit l’épée nue à la main dont il venoit de le frapper et l’auroit traité de bougre de jean-foutre. Ledit plaignant, le voyant en état de récidive, s’est mis en défense pour garantir sa vie après avoir pris un chacun à témoin. Plusieurs personnes, ayant vu l’action, en ont blâmé ledit Poisson qui a continué ses violences et fait beaucoup de menaces. Pour raison de quoi et attendu que c’est un assassinat prémédité, il est obligé de nous rendre ladite plainte.

Signé Bizoton et Boyron “

 

Voici maintenant la plainte de Paul Poisson, rendue 10 heures après celle de Baron :

” Par devant nous Charles Bizoton commissaire au Châtelet est comparu Paul Poisson, comédien du roi, demeurant rue du Four, lequel nous a dit que ce matin, étant à l’assemblée de la troupe, à l’hôtel de la Comédie, où l’on proposoit de donner quelques rôles, ayant dit son avis comme les autre, il fut entrepris par le sieur Baron, qui lui tint plusieurs discours insolens, disant que son fils étoit l’ excrément de la Comédie. A quoi ne lui ayant répondu autre chose, sinon qu’il valoit autant que lui, ledit Baron, se mettant dans des emportements effroyables, le menaça que s’il étoit hors de l’hôtel il ne lui tiendroit pas un pareil langage et ; dans l’instant le sieur Beauval et sa femme prirent le parti dudit Baron en lui disant qu’il étoit un insolent, ce qui marquoit un dessein prémédité de lui faire insulte. Il auroit prié ledit Beauval de faire taire sa femme, qui n’avoit cessé de l’insulter, et ledit Baron de lui faire plusieurs menaces en levant un canne qu’il tenoit à la main ; pour quoi il auroit été obligé, pour éviter le désordre, de se retirer, et en sortant, auroit été surpris de rencontrer dans la rue ledit Baron faisant la démonstration de lever sa canne sur lui, ce qui l’auroit obligé de se mettre en défense et tirer l’épée contre ledit Baron qui l’auroit pareillement tirée et poussé le plaignant de telle manière qu’il auroit manqué de le tuer, sans le secours du sieur Champmeslé et autres qui les auroient séparés, voyant le sieur de la Thorilière l’épée à la main à côté dudit Baron, son neveu, ce qui l’auroit obligé de leur dire qu’il n’étoit pas juste de se mettre deux contre lui. Pourquoi  il se trouve obligé de nous rendre la présente plainte.

Signé Bizoton et Poisson “

 

 Nous ne connaissons malheureusement pas l’épilogue de ces plaintes mais il est probable que le commissaire Bizoton ait renvoyé les deux protagonistes non sans les avoir au préalable copieusement sermonnés.

Les Poisson se distinguent de nouveau, quelques années plus tard, le 1er décembre 1705 une plainte est déposée par Françoise Victoire Poisson, sœur de Paul, contre un huissier qui lui a saisi indûment son mobilier. La scène est ” théâtrale “,  en présence de plusieurs acteurs témoins de l’affaire, le ton monte rapidement, et l’huissier  les traitent  de ” bougres de chiens de comédiens “.

Paul et Marie-Angélique s’installent avec Marie Claveau, en mars 1703, au château de Roinville, un joli manoir construit en 1613,  dont la devise inscrite sur le fronton est la suivante :

” Si cette maison ne te plaist,

Sans m’en désigner de nouvelle,

Laisse-la moy telle qu’elle est

Et fast la tienne plus belle

Pour se rapprocher sans doute de son ami Jean François Regnard (propriétaire du château de Grillon à Dourdan), Paul y fait installer un petit théâtre, aujourd’hui disparu, une grande salle, haute de plafond, qui occupe tout le grand comble du château. Cette salle, dont la charpente a été dissimulée par un plafond voûté, est aménagée pour servir de salle de spectacle. Un recoin sert de vestiaire aux comédiens. En ouvrant une porte, on pénètre dans un couloir qui longe la salle et qui fait œuvre de coulisses, pour déboucher sur la scène. C’est là que les Poisson apprennent leurs rôles et que Regnard, plus d’une fois sans doute, devant des amis, vient essayer lui-même ses pièces sur une scène qui est plus spacieuse et mieux adaptée pour le théâtre que le salon de Grillon.

Paul Poisson débute au Théâtre Français en 1686, un an après la retraite de son père, le populaire inventeur des Crispin. Il reprend tous ses rôles et maintient fidèlement l’aspect et les particularités des personnages de Crispin. Il crée les trois Crispin du “Légataire universel”, des “Folies amoureuses” et du “Roi de Cocagne” et se montre supérieur dans les rôles du marquis, “le Joueur”, “le Legs”, dans Turcaret et de Monsieur Jourdain du “Bourgeois Gentilhomme”.

Au printemps 1707, Regnard a une affaire assez grave sur les bras dont il va se tirer. Sa grande pièce : le ” Légataire universel ” est reçue et les rôles sont déjà distribués. Le rôle principal est donné à la Thorilière, or celui-ci tombe malade et ne peut jouer. La pièce attendue est compromise. Regnard la recompose de telle sorte que le rôle principal soit celui de Crispin, pour le donner à Paul Poisson. La pièce est scabreuse, on reproche à Crispin d’être un fripon et un homme sans mœurs. A cause de la censure, la fameuse première, si désirée et si réussie, n’aura lieu que le 9 janvier 1708. La pièce est un triomphe, on dénombre ce jour là 1100 spectateurs payants et la recette est de 2446 livres, ce qui est énorme pour l’époque ! On retrouve une certaine similitude avec Molière par les difficultés qu’il a eu pour monter son célèbre Tartuffe, créé par Gassot du Croisy.

Paul Poisson et Marie Angélique meurent tous deux à Saint-Germain-en-Laye, lui à 77 ans, le 29 décembre 1735 et elle à 99 ans le 12 décembre 1756.

Les enfants de Paul Poisson

Paul Poisson et Marie Angélique de Lécole ont eu trois enfants. Joseph Guyot raconte : “quand le poète Regnard venait à Roinville voir la famille Poisson, il trouvait près du père et de la mère, trois charmants enfants”

Magdeleine, dite Madame de Gomez, née en 1684, elle écrit des romans et des tragédies pour le Théâtre français dont “Ilabis” en 1714 et “Cléarque” en 1717.

Philippe Poisson, l’aîné, né en 1683, débute à la Comédie française en 1700. Il était certainement peu doué pour le théâtre, car s’il est dit élégamment qu’il était plutôt fait pour le travail dans un cabinet que sur les planche, le sieur Etienne Baron (voir ses démêlés avec Paul Poisson), le traite proprement “d’excrément de la comédie” ! Il se retire comme son père en 1711 et meurt à Saint-Germain-en-Laye le 4 août 1743.

François Arnould Poisson, le cadet, dit Poisson de Roinville, né en 1694, débute au Théâtre Français le 21 mai 1722 avec le rôle de Sosie dans “Amphytrion”. Encore enfant, il amusait le poète Regnard, au château de Roinville, par une verve comique qui fera de lui le digne émule de son père et de son aïeul, principalement dans le rôle de Crispin dont il hérite de tous les secrets. Il devient comédien malgré son père car il était destiné à une carrière militaire.

Il obtient en secret un “ordre de début” à la Comédie Française et réussit à convaincre son père de sa vocation et de son talent. Un jour, il lui demande “grâce” de jouer devant lui le rôle qu’il avait choisi dans le genre qu’il avait étudié. Et son père est alors si content de la façon dont il  rend le texte, qu’il se jette à son cou, l’embrasse avec des larmes de joie, reconnaît son sang et sollicite lui-même le début et la réception d’un fils si digne de son père et de son aïeul. Il prendra rapidement le surnom de Poisson de Roinville. Il excelle dans “Monsieur de Pouceaugnac”, dans le marquis ridicule de la “Mère Coquette”, dans “Bernadille” et dans “Turcaret”de Lesage. Les spectateurs rient dès qu’il apparaît en scène, ils apprécient son naturel. Il est petit et laid, il péche par ses trous de mémoire et a le tort de boire un peu trop ! Un jour qu’il joue dans la “Colonie de Sainte-Foix”, il bredouille tellement que l’auteur, irrité, lui retire son rôle. Il épouse une tragédienne, Marie Catillon qui débute en 1730 dans le rôle d’Hermione dans “Andromaque”, puis joue Chimène du “Cid” et Hortense du “Florentin” et se retire du théâtre en 1741, avec une pension de 1000 livres.

Poisson de Roinville meurt à Paris le 15 octobre 1753 à l’âge de 59 ans. Grimm, le célèbre critique, lui consacre un article des plus élogieux. Dorat avait dit ” Poisson qui si longtemps amusa tout Paris “. Grimm dans sa correspondance littéraire, commente le vers de Dorat sur Crispin III :

” La Comédie française a fait, il n’y a pas longtemps, une perte considérable dans la personne de l’illustre Poisson. Cet acteur, le dernier de sa race, était extrêmement agréable au public. Il serait peut-être impossible de donner une idée juste du jeu et du talent de cet acteur. On pourrait l’appeler un recueil général de toutes les exceptions contre toutes les règles. C’est en Turcaret, c’est en Pourceaugnac, c’est quand il avait bien adapté son habit de caractère de son rôle, ce qu’il faisait toujours à outrance, c’est alors qu’il faisait les délices du public, c’est alors que le parterre lui prodiguait les hommages qu’il est habitué de rendre aux grands hommes et aux talents supérieurs “

Compardon Emile. -Les comédiens du roi de la troupe française pendant les deux derniers siècle. -Paris, 1879

Mongrédien Georges. -La vie quotidienne des comédiens au temps de Molière. – Paris, ?

Maugrédien Georges. -Dictionnaire biographique de comédiens français au XVIIe siècle, suivi d’un inventaire des troupes 1590-1710. -Paris, 1972